Listeria monocytogenes est une bactérie à Gram positif, du genre Listeria, division des Firmicutes, qui doit son nom à Joseph Lister.
C’est la seule espèce du genre Listeria pathogène pour l’homme, provoquant la listériose. Il s’agit d’un bacille de petite taille, non sporulé, aéro-anaérobie facultatif, intracellulaire facultatif, ubiquitaire (sol, végétaux, eau), possédant une catalase et mobile à 20 °C. Selon certaines études, 1 à 10 % des humains seraient porteurs sains de L. monocytogenes dans leur intestin.
Elle a été isolée en 1926, lors d'une épidémie survenue chez les lapins et les cobayes de l'animalerie de l'université de Cambridge. Dès 1953, la transmission par contamination alimentaire, avait été avancée, cependant elle resta ignorée de la plupart des médecins jusqu'en 1981 date à laquelle la transmission alimentaire de la listériose fut mise en évidence.
En novembre 1987, une contamination de vacherins Mont d'Or fut la cause de plusieurs décès[1]. Depuis, les fromages au lait cru sont souvent accusés d'être des produits dangereux. Des mesures d'élevage (interdiction de l'ensilage, des aliments fermentés et des balles enrubannées) et de conservation ont été peu à peu mises en œuvre, avec de nombreux contrôles.
De mars 1992 à février 1993, en France, 282 cas ont été diagnostiqués entraînant 63 décès et 22 avortements à cause de langue de porc en gelée et de rillettes[2].
Plus récemment, en 2014, 15 personnes sont décédées au Danemark[3] à cause d'un produit de charcuterie contaminé.
La listériose est une anthropozoonose. Ce germe est répandu chez nombre d’espèces animales, soit comme commensal (intestin des bovidés, oiseaux et même de l’homme), soit comme agent de septicémies avec abcès multiples et monocytoses (élevage de souris, lapins) ou encéphalites (moutons, chèvres). Il est de plus très résistant dans les milieux extérieurs et peut se trouver dans la terre, le foin, les débris végétaux, etc.
La bactérie ingérée dans une nourriture quelconque peut traverser la paroi intestinale et induire divers symptômes tel un état pseudo-grippal[4] apparemment bénin, notamment chez la femme enceinte[5].
Les symptômes sont plus importants :
La période d'incubation est longue (2 à 70 jours, souvent entre 1 et 2 mois) ce qui rend le diagnostic plus difficile. De plus, il n'y a aucun signe extérieur que les aliments sont contaminés.
Petits bacilles trapus, 1 à 2 µm sur 0,5 µm, colorés régulièrement, ressemblant à des bacilles pseudodiphtériques avec lesquels il faut éviter de les confondre. Ils s’en distinguent par leur mobilité (mobile par ciliature péritriche) mais celle-ci n’est évidente que dans les cultures faites entre 20 et 30 °C. Dans les colonies R, on peut observer de longues formes filamenteuses.
Quatre types sérologiques ont été décrits ; les types 1 et 4 sont les plus fréquents.
Le dépôt d’une goutte de culture sur la conjonctive d’un cobaye ou d’un lapin provoque une kératoconjonctivite purulente (signe d’Anton).
Selon les cas, culture du LCS, hémoculture, culture de méconium pour les septicémies néonatales. Il faut connaître les listérias pour éviter d’éliminer les cultures comme « contaminants pseudodiphtériques » ou lactobacilles.
Les obstétriciens demandent souvent des sérodiagnostics pour le dépistage de la listériose en cours de grossesse. La valeur de ces tests sérologiques n’est pas établie. En séro-agglutination, il y a des faux positifs, dus à des antigènes communs entre listérias et staphylocoques ou entérocoques. On ne considère comme significatifs que des taux de 1⁄320 ou plus. Le test de fixation du complément serait plus fiable.
Songer à pratiquer une hémoculture dans tout syndrome fébrile, pseudo-grippal, chez une femme enceinte.
Listeria monocytogenes ne survit pas plus de 30 minutes à +60 °C. La pasteurisation l’élimine des aliments. Mais aux températures de réfrigération, elle continue de se développer contrairement à la plupart des autres bactéries, ce qui est un critère de sélection. Elle résiste plusieurs mois dans le sol. Elle est détruite à un pH inférieur à 4. Ce germe psychrophile est sensible à la plupart des désinfectants : les aldéhydes, les dérivés chlorés, iodés et les ammoniums quaternaires dans les conditions usuelles d’emploi. Elle résiste d’autant mieux que la température est basse et la surface poreuse.
On a identifié L. monocytogenes dans au moins 37 espèces de mammifères, domestiquées ou non, et dans au moins 17 espèces d’oiseaux et probablement dans certaines espèces de poissons et de coquillages. On peut isoler L. monocytogenes du sol, et d’autres sources de notre environnement. L. monocytogenes est plutôt résistante ; elle résiste entre autres au gel (elle est psychrotrophe).
Le problème posé par Listeria monocytogenes dans les aliments réfrigérés est sa capacité à se développer à des températures avoisinant 0 °C. Même si la population bactérienne est faible au départ, elle est susceptible d’augmenter lors de l’entreposage et de la distribution et d’atteindre des niveaux significatifs pouvant causer la listériose alimentaire. Elle ne peut pas se développer dans les aliments congelés, mais si la contamination a lieu avant la surgélation, l’organisme peut y survivre et recommencer à se développer lors de la décongélation, atteignant des niveaux dangereux pour la santé humaine. La bactérie peut être hébergée dans le tube digestif de certains mammifères, y compris celui de l’homme, qui peuvent être porteurs sains de la bactérie.
L’infection par L. monocytogenes provoque une maladie, la listériose. Il existe de nombreux variants, plus ou moins virulents[7].
La période d’incubation peut durer de 2 à 70 jours après l’ingestion de l’aliment, ce qui gêne la recherche rétrospective des aliments mis en cause lors d’un épisode clinique.
Les infections sont isolées ou peuvent être groupées dans le temps et on parle alors d’épidémie de listériose. Dans ce cas, le dispositif de surveillance mis en place en France cherche à identifier l’aliment en cause, ce qui a permis de montrer la responsabilité des charcuteries industrielles (rillettes et langue de porc en gelée) et de certains fromages dans les dernières épidémies.
« La listériose est une maladie rare, dont la fréquence a été diminuée par trois depuis 1987 ; on est passé de 661 cas alors recensés à 458 en 1992 et 228 en 1997 », selon Anne-Marie Vanelle, sous-directrice de l’hygiène alimentaire à la Direction générale de l’Alimentation (DGAL). « Cette diminution régulière est due aux efforts des professionnels, sous l’égide des services de contrôle, notamment grâce au recours généralisé aux méthodes HACCP (Analyse des risques et maîtrise des points critiques), pour la maîtrise du risque Listeria. Les industriels ont fait des efforts gigantesques, mais le risque zéro n’existe pas. Aujourd’hui, nous sommes arrivés à un seuil où les efforts vis-à-vis des matières premières doivent s’accompagner d’une information appropriée, notamment médicale, qui permettra de faire baisser le nombre de cas. »
Selon l'INVS, "Le nombre de listériose diagnostiqués par an en France se situe autour de 300 cas, soit une incidence annuelle de 0,4 cas / 100 000 habitants"[8] et il y a eu 63 décès en 2013[9].
Elle nécessitait une prise de conscience du risque, qui est récente (l’hypothèse d’une transmission alimentaire de la maladie n’a été confirmée qu’en 1981. Puis le développement des techniques analytiques a permis de mettre en évidence la présence de Listeria dans la plupart des produits destinés à la consommation humaine.
Depuis, la réglementation a été étoffée et durcie, les contrôles sanitaires renforcés, les techniques d’analyses améliorées.
La prévention passe aujourd’hui par la surveillance (de la fourche à la fourchette en Europe) des aliments susceptibles de transmettre Listeria monocytogenes, avec d’éventuelles décisions de retrait de la consommation. Mais cette approche minimise le risque épidémique.
De façon générale, les aliments les plus à risque sont les aliments crus : les poissons fumés, les graines germées, les charcuteries cuites consommées sans réchauffage, la charcuterie crue, les coquillages et poissons crus et leurs sous-production (tarama, surimi…).
Paradoxalement, et contrairement à ce qui était dit de ce type d’aliment, les fromages élaborés à base de laits crus assurent leur propre défense contre la prolifération de Listeria monocytogenes[1]. La chute de la biodiversité microbienne des fromages à base de laits microfiltrés ou des laits pasteurisés favorise la croissance de Listeria monocytogenes, qui prolifère en cours d’affinage[10],[11].
Il existe plusieurs modes possibles de transmission de la maladie :
L’infection est identifiée dans le sang, le liquide céphalo-rachidien ou d’autres prélèvements par les laboratoires de bactériologie. Le laboratoire peut alors donner des indications utiles à la thérapeutique. La sérologie est d’un emploi limité.
Des méthodes de typages moléculaires très précises et toujours applicables sont utilisées. Le typage s’effectue sur les protéines et l’ADN. Le typage par les protéines est réalisé par électrophorèse d’isoenzyme (Multilocus enzymes analysis) qui mesure la variation de mobilité électrophorétique d’enzymes (ADH, G6PDH, fumarase…).
Cette méthode permet d’identifier deux groupes de Listeria monocytogenes : le premier avec les souches 1/2 b et 4 b, et le second avec les souches 1/2a et 1/2c.
Le typage par l’ADN utilise des méthodes d’électrophorèse classique après l’action d’enzyme de restriction (EcoRI).
Il n’existe pas de vaccination. Celle-ci a été tentée chez les animaux sans résultats satisfaisants. Ces mutants ne produisent pas d’anticorps protecteurs.
La sensibilité des Listeria pour les antibiotiques a peu évolué depuis plusieurs décennies. L’ampicilline et l’amoxicilline gardent toujours leur place et leur association avec les aminosides est fortement bactéricide. Les tétracyclines sont actives et les quinolones ont été utilisées avec succès comme l’association sulfamide-triméthoprime. Pour enrayer la listériose, les médecins utilisent surtout des pools d’antibiotiques, et en particulier la pénicilline, la streptomycine et les sulfamides. Ce traitement est prolongé avec des lactamines.
Mais les résultats restent aléatoires et dépendent surtout de l’état du système immunitaire du patient. La thérapie est efficace si elle est entreprise tôt. Le traitement est nécessairement de quelques semaines dans le cas de listériose.
Listeria monocytogenes est une bactérie pathogène opportuniste, attaquant préférentiellement les sujets dont le système immunitaire est perturbé. C’est le cas pour :
Remarque : les sujets âgés bien portants n’ont pas un risque beaucoup plus élevé que celui de la population générale et les enfants, mêmes jeunes, ont un risque identique, voire plus faible, que celui de la population générale.
Les producteurs de produits alimentaires doivent respecter des normes microbiologiques, dont une limite ou une absence de Listeria, selon la catégorie de produit[13].
Précautions à prendre pour la prévention de la listériose chez les femmes enceintes, les patients immuno-déprimés et les personnes âgées :
Listeria monocytogenes peut également contaminer des produits qui subissent une cuisson lors de leur fabrication ou stockage. Ces produits présentent ainsi le même risque que les produits crus contaminés. D’après les enquêtes, il s’agit pour l’essentiel de produits de charcuterie : éviter les rillettes, pâtés, foie gras, produits en gelée…
Pour ces produits, ainsi que les autres produits de charcuterie (type jambon), préférer les produits préemballés aux produits à la coupe et les consommer rapidement après l’achat. Les produits préemballés sont conditionnés dans un environnement contrôlé, alors que les produits vendus à la coupe présentent des risques de contamination importants par le personnel du rayon coupe, les autres produits et chez le consommateur. Cependant une chaîne de production contaminée produira des aliments contaminés identiques, que ce soit sous des marques à l’image luxueuse ou sous des produits sans marques. Seul le numéro d’identification du fabricant de type F 53-032-01 permettra d’identifier l’entreprise qui a fabriqué le produit.
Éviter la consommation de produits de charcuterie consommés crus comme les lardons, le bacon, le jambon, etc. Les faire cuire avant consommation. Ces mesures sont suffisantes pour éliminer les germes qui se trouvent en majorité en surface de ces aliments. En effet, il n’y a pas de Listeria dans un cassoulet, une daube ou une blanquette si ces plats sont cuits à la maison longuement à partir de produits frais utilisés rapidement sans stockage. Par contre, pour les steaks hachés, qui sont des aliments reconstitués et pour lesquels cette notion de contamination en surface ne peut être retenue, une cuisson à cœur est impérative.
Conserver les aliments crus (viande, légumes, etc.) séparément des aliments cuits ou prêts à être consommés ; après la manipulation d’aliments non cuits, se laver les mains et nettoyer les ustensiles de cuisine qui ont été en contact avec ces aliments.
Éviter la consommation de produits achetés au rayon traiteur.
Éviter la consommation de coquillages crus, surimi, tarama.
Il faut laver soigneusement les légumes crus et les herbes aromatiques.
Les règles habituelles d’hygiène doivent également être respectées.
Les restes alimentaires et les plats cuisinés doivent être réchauffés soigneusement avant consommation immédiate.
Il faut nettoyer fréquemment et désinfecter son réfrigérateur avec de l’eau javellisée.
Si une croûte de fromage au lait cru abrite une diversité microbienne importante et d'une certaine qualité, elle est facteur de sécurité microbienne alimentaire ; ce consortium microbien se montrant capable de s'auto-protéger contre la pullulation de la bactériepathogène L. monocytogenes, propriété que les fromages traditionnels exploitent depuis des siècles, même si les interactions microbiennes impliquées dans l'inhibition de L. monocytogenes ou d'autres pathogènes sont encore mal comprises[14].
Texte anglais à traduire :
The infective dose of L. monocytogenes is unknown but probably varies with the strain and with the susceptibility of the victim. From cases contracted through raw or supposedly pasteurized milk, one may safely assume that in susceptible persons, fewer than 1,000 total organisms may cause disease. L. monocytogenes may invade the gastrointestinal epithelium. Once the bacterium enters the host's monocytes, macrophages, or polymorphonuclear leukocytes, it becomes blood-borne (septicemic) and can grow. Its presence intracellularly in phagocytic cells also permits access to the brain and probably transplacental migration to the fetus in pregnant women. The pathogenesis of L. monocytogenes centers on its ability to survive and multiply in phagocytic host cells.
L. monocytogenes has been associated with such foods as raw milk, supposedly pasteurized fluid milk, cheeses (particularly soft-ripened varieties), ice cream, raw vegetables, fermented raw-meat sausages, raw and cooked poultry, raw meats (of all types), and raw and smoked fish. Its ability to grow at temperatures as low as 3°C permits multiplication in refrigerated foods.
When listeric meningitis occurs, the overall mortality may reach 70%; from septicemia 50%, from perinatal/neonatal infections greater than 80%. In infections during pregnancy, the mother usually survives. Reports of successful treatment with parenteral penicillin or ampicillin exist. Trimethoprim-sulfamethoxazole has been shown effective in patients allergic to penicillin.
The methods for analysis of food are complex and time-consuming. The present FDA method, revised in September, 1990, requires 24 and 48 hours of enrichment, followed by a variety of other tests. Total time to identification takes from 5 to 7 days, but the announcement of specific nonradiolabled DNA probes should soon allow a simpler and faster confirmation of suspect isolates.
Recombinant DNA technology may even permit 2-to-3 day positive analysis in the future. Currently, the FDA is collaborating in adapting its methodology to quantitate very low numbers of the organisms in foods.
Listeria monocytogenes est une bactérie à Gram positif, du genre Listeria, division des Firmicutes, qui doit son nom à Joseph Lister.
C’est la seule espèce du genre Listeria pathogène pour l’homme, provoquant la listériose. Il s’agit d’un bacille de petite taille, non sporulé, aéro-anaérobie facultatif, intracellulaire facultatif, ubiquitaire (sol, végétaux, eau), possédant une catalase et mobile à 20 °C. Selon certaines études, 1 à 10 % des humains seraient porteurs sains de L. monocytogenes dans leur intestin.