Lactarius deliciosus
Lactarius deliciosus, le Lactaire délicieux, est une espèce de champignons basidiomycètes de la famille des Russulaceae. Il fait partie d'un groupe de Lactaires à latex orangé ou rougeâtre assez ressemblants, mais sa taille assez grande, son chapeau rouge orangé peu verdissant, sa chair à la saveur douce, son latex orange vif immuable, son pied court à fossettes et son biotope permettent de le différencier de ses espèces proches. Strictement inféodé aux Pins, il est présent sur l'ensemble de l'Eurasie et des Amériques. Il s'agit d'un champignon comestible très estimé des peuples du pourtour méditerranéen et parti prenante de la gastronomie provençale.
Le naturaliste norvégien Carl von Linné théoricien de la nomenclature binomiale moderne décrit cette espèce en 1753 dans son Species plantarum sous le nom Agaricus deliciosus et la classe dans le genre Agaricus. Le mycologue danois Elias Magnus Fries, dont les travaux sont précurseurs en mycologie, approuve et précise sa description qui deviendra la base de son actuelle définition. En 1821, elle est placée dans le genre Lactarius par le Britannique Samuel Frederick Gray[1]. Son épithète spécifique « deliciosus » (délicieux) est à mettre en relation avec ses qualités gustatives très appréciées.
Ce taxon porte en français le nom vulgarisé et normalisé « Lactaire délicieux »[2]. Il porte également les noms vernaculaires « Catalan[3] », « Safrané[3] », « Pinin[4] », « Barigoule[5] » « Rude[réf. nécessaire] », « Catlan[réf. nécessaire] », « Roussillou[réf. nécessaire] », « Arugue[réf. nécessaire] », « Safran[réf. nécessaire] », « Pinet[réf. nécessaire] », « Sanguin[réf. nécessaire] », et « Marseillais[réf. nécessaire] ».
Le Lactaire délicieux est classé dans la famille des Russulaceae car ses lamelles non fourchues sont rayonnantes et décurrentes et sa chair présente une texture grenue friable et cassante constituée de cellules sphériques : les sphérocystes. Ses spores présentent des verrues ou des crêtes et sont amyloïdes, c'est-à-dire qu’elles deviennent violet pourpre foncé sous l’action de solutions iodées comme le réactif de Melzer. Il est en association ectomycorhizienne[7],[8].
Ce champignon est inclus dans le genre Lactarius à cause de sa chair traversée par des canaux laticifères desquels coule un latex plus ou moins abondant à la cassure[7],[8].
Il appartient au sous-genre Lactarius caractérisé par sa cuticule généralement lisse, parfois fibrilleuse ou laineuse, ou à marge plus ou moins barbue, souvent lubrifiée ou visqueuse, mais jamais veloutée[7],[8].
Cette espèce appartient à la section Dapetes dont la section Deliciosini est un synonyme. Elle regroupe les espèces au lait orangé à rouge vineux ou rougissant, parfois bleuissant et au chapeau de couleur orangé à rougeâtre ou violacé, parfois entièrement verdissant avec l'âge[7],[8],[9].
Enfin, L. deliciosus est rangé au sein de la sous-section Deliciosini définie par son lait orangé à la coupe, parfois teintée de vert en vieillissant[7],[8],[10],[11].
D'après Linné, Lactarius deliciosus n'est qu'une seule et même espèce et comprend une soixantaine de sous-espèces. Depuis 1753, 41 espèces, variétés et formes ont été publiées dans cette section en Europe, mais seules sept espèces sont reconnues par les mycologues des années 1980 aux années 2000[7],[8],[10],[11],[9]. En 2005, les travaux de Nuytinck & Verbeken permettent d'établir que la section Deliciosi inclut L. pornincis au lait blanc et de synonymiser L. deterrimus et L. fennoscandicus ainsi que L. sanguifluus et L. vinosus[9].
En 2007, une étude phylogénétique de Nuytinck & Verbeken précise la place de chaque espèce au sein de ce groupe et confirme les études d'André Marchand des années 1970 qui distinguaient ces espèces en fonction de leur arbre associé[12]. Cependant, elle remet en question la spécificité de chaque taxon et considère la quasi-totalité des espèces du groupe Deliciosini comme des sous-espèces de L. deliciosus[6].
Le Lactaire délicieux produit un sporophore au chapeau mesurant de 5 à 12 cm de diamètre parfois jusqu'à 16 cm. Il est charnu, légèrement convexe, puis plat, déprimé au centre et enfin en forme d'entonnoir. Sa marge est mince, pruineuse chez les jeunes spécimens et longtemps enroulée, puis recourbée vers le bas et ondulée en vieillissant. Sa cuticule est mince, élastique, soyeuse, un peu visqueuse et brillante par temps humide, d'aspect glacé quand elle est sèche, avec des zones concentriques évidentes, souvent avec des fossettes, également nommées scrobicules, et des guttules surtout vers la marge. Le chapeau est coloré de crème orangé, rose orangé, rouge orangé ou orange chair ; les guttules et zonations étant plus foncées et tirant sur le brun rougeâtre. Il présente parfois des taches verdâtres dans les lésions[4],[3],[8].
Ses lamelles sont épaisses et serrées, adnées à sub-décurrentes, minces et élastiques, avec de nombreuses lamellules arquées et fourchues au niveau du pied. Elles sont de couleur orange, jaune orangé ou orange saumoné pâle et ne verdissent pas sur les lésions. Leur sporée est crème jaune pâle[4],[3],[8].
Son pied, court et cylindrique, qui mesure de 2 à 4 cm de haut, parfois 6 cm, pour 1 à 2 cm d'épais, rarement 3 cm, est coloré de blanc orangé à crème orangé et clairement couvert de fossettes irrégulières plus foncées, de couleurs orange foncé, rouge orangé ou orange brun. Plein puis creux, il est souvent vermoulu. Il ne verdit pas[4],[3],[8].
Sa chair est ferme et épaisse, généralement cassante, molle et élastique dans le pied, de couleur orange carotte, puis plus foncée, presque rougeâtre ; le cœur du pied conservant une coloration blanche. Son odeur est fruitée et agréable et son goût est similaire quoi que légèrement amer sur le tard. De toutes ses parties coule un latex orange vif, tachant, peu abondant, à la saveur douce qui rougit très lentement et ne verdit quasiment pas à l'oxydation[4],[3],[8].
Fossettes (scrobicules) du pied.
Ensemble des formes et variétés selon MycoBank (14 octobre 2021)[1] :
Le Lactaire délicieux pousse en troupes souvent abondantes, avec des pieds parfois cespiteux, dans les bois secs thermophiles en association ectomycorhizienne exclusive avec les Pins dont Pinus halepensis, P. Ieucodermis, P. nigra, P. pinaster, P. pinea, P. strobus et P. sylvestris. Il est plutôt indifférent au pH et à la texture du sol. Très fréquent sur le pourtour méditerranéen à l'automne, il se raréfie à des latitudes plus élevées[8] où il semble néanmoins devenir plus courant[13].
Le Lactaire délicieux est présent sur l'ensemble de l'écozone néarctique, du Canada au Mexique, de l'écozone néotropicale du Guatemala à l'Uruguay ainsi que de l'écozone paléarctique, en Europe, en Afrique du Nord et en Asie de la Turquie à Hong-Kong en passant par la Sibérie et l'Himalaya[14].
En Europe, Lactarius deliciosus se distingue de ses congénères par sa chair à la saveur douce, son latex orange vif non verdissant, son chapeau peu verdissant et son association exclusive avec les Pins[3],[8].
Il peut être confondu avec les autres Lactaires à lait orangé appartenant à la sous-section Deliciosini (sous-genre Lactarius, section Dapetes) soit L. quieticolor, le Lactaire gris orangé, L. sanguifluus, le Lactaire sanguin, L. semisanguifluus, le Lactaire semi-sanguin, L. vinosus, le Lactaire vineux, L. salmonicolor, le Lactaire couleur saumon, L. deterrimus, le Lactaire de l'Épicéa. Ces confusions n'ont pas de conséquences néfastes pour la santé[3],[8].
Vue de dessus, le Lactaire délicieux est également morphologiquement proche de Lactaires à lait blanc tels que L. pubescens et L. torminosus, inféodés aux Bouleaux et légèrement indigestes[3],[8],[4].
L. quieticolor, le Lactaire gris orangé
L. sanguifluus, le Lactaire sanguin
L. semisanguifluus, le Lactaire semi-sanguin
L. vinosus, le Lactaire vineux
L. salmonicolor, le Lactaire couleur saumon
L. deterrimus, le Lactaire de l'Épicéa
Lactarius deliciosus versus L. pubescens versus L. torminosus.
Selon les mycologues français[3], la FAO[14], l'ANSES française[15], le DFI suisse[16] et le SPF Santé publique belge[17], il s'agit d'un bon champignon comestible.
Connu au moins depuis la Rome antique, le Lactaire délicieux (ou à tout le moins une des espèces comestible de la sous-section Deliciosini) figure sur une fresque de Pompéi nommée « Cacciagion é funghi ». Il est considéré comme un comestible de choix par les peuples méditerranéens notamment en Catalogne (sous le nom de "Rovello" ou "Pinetell"), aux Baléares, en Provence dans le Sud de la France et en Italie : en Ligurie (sous le nom de "Sanguin"), en Sardaigne, en Campanie et en Calabre (sous le nom de "Rosito"). Il est également consommé en Grèce et dans les îles de la mer Égée[8]. Il fait aussi partie des champignons les plus consommés, avec le Cèpe de Bordeaux, par les peuples sibériens et chinois. Enfin, il est également récolté en Pologne, en Bulgarie, en Biélorussie, en Ukraine, en Turquie, en Arménie, en Jordanie, au Kirghizstan, au Népal, à Hong-Kong, au Canada, aux USA, au Mexique, au Costa-Rica, au Guatemala, au Chili et en Uruguay[14].
Le Lactaire délicieux fait l'objet d'un commerce important dans le Nord de l'Espagne où il constitue parfois une part non négligeable de l'économie locale[14] notamment en Catalogne où sa cueillette déclenche une fièvre populaire, la « febre cercatore », chaque cueilleur repartant le panier rempli de chapeaux sanguinolents coupés à ras[12] ainsi qu'à Castille-et-León, où sa récolte est également florissante[18].
Le Lactaire délicieux est notamment apprécié au grill accommodé d'une persillade placée dans la partie conique du champignon. Le cuire à feu vif permet de faire évaporer le lait qui est légèrement âcre[19]. Traditionnellement, il est utilisé en tant que farce d'artichauts dans la recette provençale des artichauts à la barigoule[20]. Préparés à l'huile, les champignons peuvent être conservés deux années et consommés à l’apéritif ou en entrée : après les avoir fait dégorger dans une poêle, puis cuits mouillés d'un verre de vinaigre, ils sont placés dans un bocal, assaisonnés d'herbes de Provence, de sel, de poivre et parfois d'un peu de piment, puis recouverts d'huile[21]. Ou encore, ils peuvent être lavés et déposés dans un récipient en couches bien serrées et salées à la manière d'une choucroute, l'eau rendue par les champignons les recouvrant petit à petit[12].
Le Lactaire délicieux colore l'urine en rouge sans que ce soit délétère[12] et la présence éventuelle du mycoparasite Hypomyces lateritius ne semble pas nuire à sa comestibilité et lui donne une texture croquante parfois recherchée[8]. Cependant l'espèce a la capacité de concentrer le césium 137[22].
Lactarius deliciosus a pour synonymes[23] :
Lactarius deliciosus
Lactarius deliciosus, le Lactaire délicieux, est une espèce de champignons basidiomycètes de la famille des Russulaceae. Il fait partie d'un groupe de Lactaires à latex orangé ou rougeâtre assez ressemblants, mais sa taille assez grande, son chapeau rouge orangé peu verdissant, sa chair à la saveur douce, son latex orange vif immuable, son pied court à fossettes et son biotope permettent de le différencier de ses espèces proches. Strictement inféodé aux Pins, il est présent sur l'ensemble de l'Eurasie et des Amériques. Il s'agit d'un champignon comestible très estimé des peuples du pourtour méditerranéen et parti prenante de la gastronomie provençale.